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Comment Transdev veut s'inspirer de son expérience allemande pour concurrencer la SNCF en France
La France va ouvrir l'an prochain ses lignes régionales à la concurrence. Transdev compte se positionner en créant des sociétés locales avec des personnels polyvalents. Une recette qui lui a réussi outre-Rhin.
Devenu numéro deux du ferroviaire en Allemagne après vingt-cinq ans de concurrence, le groupe Transdev compte sur cette expérience pour tirer son épingle du jeu en France. La direction de Transdev aime citer le cas de la Schönbuchbahn, une petite ligne de 17 km à la périphérie de Stuttgart (sud-ouest) que la Deutsche Bundesbahn -l'équivalent allemand de la SNCF- avait fermé en 1967.Les autorités locales l'ont récupérée pour un mark symbolique afin de la remettre en état. Succès: alors que les bus transportaient quelque 2000 personnes par jour avant le retour des trains en 1996, on approche maintenant des 10.000, si bien qu'il a été décidé d'électrifier la ligne, de construire un nouveau dépôt et d'acheter des trains neufs. D'autres petites lignes sont ainsi réactivées autour de Stuttgart.
Un engagement local
La modernisation de la Schönbuchbahn aura coûté près de 140 millions d'euros. "Il n'y a pas beaucoup de collectivités en Allemagne qui peuvent se permettre ce type d'investissement", reconnaît volontiers Walter Gerstner, le chef du syndicat mixte qui gère la ligne. Nous sommes en effet dans la région la plus riche du pays, au pays de Porsche et Mercedes. "La clef du succès pour une petite ligne, c'est l'engagement local d'une organisation politique, avec une petite entreprise ferroviaire. Il faut connaître les gens", juge Walter Gerstner.
Même besoin de proximité pour la Strohgäubahn, une autre petite ligne à 25 kilomètres de là. "Il nous arrive d'avoir à travailler avec la Deutsche Bahn (l'opérateur historique qui a succédé à la Bundesbahn, ndlr). C'est très difficile, on a beaucoup de mal à trouver le bon interlocuteur", constate Ralf Rotermund, directeur des mobilités du syndicat mixte local. On croirait entendre un élu français parler de la SNCF... Ces deux lignes ont été confiées à la Württembergische Eisenbahn-Gesellschaft (WEG), une filiale locale de Transdev qui en exploite cinq dans la région.
Le groupe français -filiale de la Caisse des Dépôts (à 66%) et du groupe allemand Rethmann (34%)- réalise 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires en Allemagne, sur un total de près de 7 milliards. Il y détient une galaxie de compagnies dont la plupart exploitent des lignes mises en concurrence par les régions allemandes, en Rhénanie (ouest), à Brême (nord-ouest), en Bavière (sud), dans la Saxe (est)... Transdev est devenu le deuxième groupe ferroviaire en Allemagne, avec 7,3% du marché du marché allemand des liaisons régionales quand la Deutsche Bahn en a gardé 64,3%.
Créer des sociétés locales
La France s'apprêtant à ouvrir l'an prochain ses lignes régionales à la concurrence selon un modèle très proche, le groupe veut maintenant s'appuyer sur des renforts venus d'Allemagne pour répondre aux appels d'offres qui vont bientôt tomber dans le Grand-Est, les Hauts-de-France, PACA et les Pays-de-la-Loire.
Potentiellement opposé sur ce marché à RATP Dev, à Trenitalia, à Arriva (groupe Deutsche Bahn), éventuellement à Keolis (groupe SNCF) et bien sûr à la SNCF elle-même qui voudra défendre ses positions, Transdev veut mettre en avant "une connaissance fine du territoire". "Il faut définir une offre avec les bonnes fréquences et apporter la bonne qualité de service", pointe son directeur général pour la France, Edouard Hénaut.
Comme en Allemagne, il entend créer des sociétés locales assez autonomes, préfère pouvoir entretenir la voie sans avoir affaire à SNCF Réseau, et veut des personnels polyvalents. A la Schönbuchbahn, par exemple, le conducteur du train déclenche lui-même le lavage du train qu'il amène au dépôt. "Pour la WEG c'est normal, pour la Deutsche Bahn, non", persifle-t-on. Encore un parallèle avec la SNCF, qui elle aussi rêve de rendre ses cheminots plus polyvalents pour baisser les coûts.
Le trafic des trains régionaux allemands a augmenté de 50% entre 2002 et 2016, tandis que l'offre a crû de 33%, avec des trains plus confortables, expose Bernd Rosenbusch, le patron de l'autorité régionale des transports de Munich MVV. Et si la Deutsche Bahn a perdu des parts de marchés depuis la perte de son monopole de 1994, son "activité a progressé parce que le gâteau est plus gros", remarque-t-il.
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