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L’Intercity classique, un train qu’il ne faut pas oublier

Standardisation, volume et concurrence de l’aviation. C’est le principal fil conducteur des politiques Grande Ligne des réseaux ferroviaires

L’Intercity classique, un train qu’il ne faut pas oublier

Pour y parvenir, ils ont misé sur la grande vitesse, en oubliant un peu la valeur ajoutée du train Intercity classique.

Mettons rapidement les choses au point : un pays n’est pas l’autre. Rien de commun entre une Espagne relativement déserte et le maillage géographique des villes anglaises ou allemandes. Rien de commun non plus avec le relief tourmenté de l’Europe centrale, région où la grande vitesse se fait plutôt rare. L’Italie et la Suède sont des pays longiformes.

De même, au niveau attractivité, rien de comparable entre Paris, Madrid ou Londres, dont le centralisme est affirmé depuis toujours, et Berlin, Vienne, Stockholm ou Rome qui sont un peu plus excentrées dans leur propre pays. Vienne tente d’ailleurs de combler cet handicap en se déclarant « hub d’Europe centrale ».

Enfin, un certain nombre de pays ont des villes « mondiales » rivalisant avec leur propre capitale : Milan contre Rome, Barcelone contre Madrid, Munich contre Berlin et dans une certaine mesure Manchester contre Londres. Et en France ? On ne trouve aucune rivale mondiale face à Paris. Tous ces éléments fondent bien évidemment la politique grande ligne des réseaux concernés.

Ces grands pays dont les villes importantes sont distantes de plusieurs centaines de kilomètres ont installé un réseau aérien domestique parfois important afin de les relier entre elles ou vers leur capitale. La totalité de ces compagnies aériennes était aux mains des gouvernements nationaux.

Les autorités successives de ces pays ont cru pendant plusieurs décennies que le train ne relevait plus que de quelques grands axes, aveuglés par la conviction très américaine que le monde aérien et l’automobile étaient l’avenir du transport des personnes.

La réponse à cette concurrence est venue sous forme de grande vitesse ferroviaire. Il faut souligner que cette migration vers la grande vitesse n’a pas toujours eu le soutien des gouvernements des années 70, très sceptiques sur les capacités du rail à progresser au niveau technologique.

La grande vitesse devient une star

Le train à grande vitesse sur lignes dédiées est apparu dès les années 1980-1990, principalement en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne. La Grande-Bretagne est restée à l’écart de ce mouvement, excepté la courte ligne reliant Londres au tunnel sous la Manche.

Certains réseaux ont cru que la grande vitesse suffirait à elle-même et ont désinvesti dans les grands express classiques, devenus désuets. Or les années 90-2000 ont coïncidé avec une vaste restructuration de l’industrie ferroviaire, autrefois sous-traitante des compagnies étatiques. Cette industrie, face à l’engouement de la grande vitesse, a cessé de produire la voiture voyageurs UIC classique de 26,40m, avec ses 80 places en seconde et 54 en première. Un drame pour les petits opérateurs qui, pour se lancer, ont dû se contenter de racheter les anciens véhicules UIC souvent très âgés.

Le problème du matériel roulant

Le bon vieux train intercity qui serpente à 140 ou 160km/h est maintenant vendu sous forme d’automotrices, comme les rames Stadler KISS, les Oaris de CAF ou les rames IEP d’Hitachi Rail. Cependant, certaines firmes comme Astra, CAF ou Siemens-Autriche produisent toujours des voitures, comme celles d’Astra achetées par Regiojet, celles de CAF pour le Caledonian Sleeper et bien entendu, celles de Siemens pour les ÖBB (Railjet et Nightjet).

Mais pour les nouveaux opérateurs, l’achat de matériel neuf peut s’avérer coûteux. On constate aussi que seuls les pays germaniques ont eu les conditions politiques pour créer un marché de seconde main, qui fait le bonheur des RDC, Flixtrain, Regiojet et d’un tas de propriétaires. Tout un écosystème d’ateliers spécialisés est apparu pour répondre aux nouveaux venus. Dans les autres pays, la vente de véhicules provenant d’entreprises publiques est prohibée. Deux cultures politiques dans une seule Europe, difficile de prétendre parler d’Europe du rail dans ces conditions…

Le train Intercity a pourtant toute sa place au côté de la grande vitesse. La bonne idée de certains grands réseaux est de ne pas faire de différence entre trains classiques et grande vitesse au niveau du marketing. La compagnie italienne Trenitalia a regroupé ses services grande ligne sous le vocable « Frecce » (Flèche), en trois couleurs distinctives. La Deutsche Bahn regroupe aussi ses trains sous le vocable « Intercity », sans distinction réelle s’il s’agit d’un ICE à grande vitesse ou d’un Intercity classique. Cette politique est moins claire en Espagne et en France. La SNCF tente de regrouper tous ses trains low cost Ouigo mais en conservant malgré tout la distinction entre TGV et « vitesse classique ».

Les autrichiens ont montré une voie avec leurs Railjets, qui remplacent l’ancien vocable « Intercity » et « Eurocity », mais il faut rappeler que l’Autriche, comme ses voisins de l’Est, n’aura jamais de réseau à grande vitesse comme en Espagne ou en France.

Le train Intercity est aussi celui qui relie des villes moyennes aux grandes, ou des villes à l’écart des grands flux. Il n’y a plus de Bruxelles-Strasbourg-Bâle ni de Lille-Luxembourg et les grandes transversales sont souvent rabaissées au niveau du trafic local. La coopérative française Railcoop veut tenter de remettre ces transversales en service.

En Grande-Bretagne, la grande vitesse entre Birmingham et Leeds a été récemment supprimée dans cette région déshéritée. Un projet politique au sens large appelé « Northern Power House » tente, sur son volet transport, de remettre en place des liaisons Intercity mieux coordonnées entre les « Core Cities » de Hull, Manchester, Liverpool, Leeds, Sheffield et Newcastle.

L’Intercité en Europe est décliné sous des formes assez semblables. Ses atouts sont la systématisation des horaires et du matériel roulant. Leur créneau s’insère dans les relations longues-distances, qu’elles soient à grande vitesse ou non, ou partiellement. Le marketing de ces trains fait partie d’un ensemble cohérent, comme en Autriche ou en Italie, où le produit « Intercity » est inclus dans un ensemble tarifaire complet sans être relégué.

Il n’est pas un train secondaire par rapport à de nouveaux produits, il est inséré dans le marketing de tous les transports longue-distance. Il peut générer des revenus et apporter une plus-value à la desserte fine du territoire, sans transformer ces « express » en train local comme le veulent certains élus au fond de leur province…

Auteur: Frédéric de Kemmeter

www.mediarail.wordpress.com

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